Être une artiste sociale ça veut dire pour moi considérer l'art comme un support de rencontres. Un langage. Un moyen de communication non verbale. Un outil d'expression et d'épanouissement individuel et collectif. Un outil de transmission et de lien social.
Je ne suis pas un professeur d'arts plastiques, mais une animatrice qui utilise la peinture comme support de communication et de rencontres.
Selon Deleuze,"la peinture est le langage analogique par excellence".
En tant qu'artiste sociale, cette dimension analogique m'intéresse tout particulièrement. Pour moi la peinture est essentiellement abstraite et non verbale, même si on y reconnait des figures ou si on y attache des concepts... Appréhender la peinture ainsi me permet un travail d'introspection et de dialogue. C'est sur quoi se fondent mon travail en tant qu'artiste peintre, aussi bien que ma pédagogie face aux différents publics.
C'est le fil conducteur entre ma peinture et mes deux métiers d'animatrice et de formatrice.
Photo : Paula Rocha
Pourquoi le public âgé :
Deux raisons m'ont amenée à me spécialiser sur le public âgé. D'abord par une question d'affinité : je me suis toujours senti attirée par la vieillesse.
La deuxième raison concerne le fait que la vieillesse, contrairement à l'enfance, est une période du développement de l'individu peu explorée d'un point de vue créatif. Pourtant, j'ai pu constater à plusieurs reprises, lors de mes différentes expériences avec ce public, son surprenant potentiel créatif.
Si la vieillesse est considérée à tord, car on vieillit tout au long de la vie, comme une dégénérescence du corps, on sait qu'il n'en est rien pour l'esprit. Cela concerne même les stratégies d'apprentissage. Le vieillard est aussi capable d'apprendre et de s'épanouir que l' adulte... Cela va dépendre plus de la motivation, du désir et du plaisir que la personne éprouve que de sa "mémoire". Contrairement à se que l'on peut croire, la perte de la mémoire immédiate ne représente pas un vrai handicap vis à vis de l'expression artistique. Cela peut paraitre surprenant, mais je ne cesse de constater chez les personnes soufrant d'une la "perte de mémoire", notamment quand celle-ci est liée à la démence, un "lâcher prise" et une facilité particulière de s'exprimer dans l'activité artistique, une capacité naturelle d'être dans le sensoriel.
Cette idée d'une dimension créative de la vieillesse peut aider nos sociétés modernes à porter un nouveau regard sur nos ainés. Elle soulève aussi la question du développement de la capacité de création chez l'individu à toutes les étapes de la vie.
A mes yeux, la vieillesse a beaucoup de choses à nous apprendre sur les mécanismes de création du langage artistique et sur l'incidence que celui-ci a sur le développement de l'identité existentielle de l'individu (son rapport avec soi, avec l'autre et avec le monde qui l'entoure).
Photo : Paula Rocha
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